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Faux arrêts de travail entre 9 et 15 euros sur Internet : ne pas travailler n’a jamais été aussi simple (fraude)

Alors que les arrêts de travail se multiplient dans un contexte de vigilance accrue sur les dépenses publiques, une dérive silencieuse s’installe sur les marges du système de santé. Pour une poignée d’euros, il est désormais possible d’obtenir un faux certificat d’arrêt maladie sans consultation, sans dossier médical, sans vérification. Ces documents contrefaits circulent librement sur des canaux numériques opaques et ciblent autant les salariés en quête de jours de repos frauduleux que les entreprises démunies face à ces pratiques. Le phénomène se banalise, les identités de médecins sont usurpées, et l’Assurance maladie peine à en tracer l’origine. Chaque document falsifié constitue une fraude, mais leur accumulation représente un manque à gagner considérable pour les finances collectives. Une économie parallèle, discrète mais organisée, s’installe dans les interstices d’un système encore largement basé sur la confiance.

Faux certificats pour quelques euros : une fraude qui se répand sur le web

Il ne faut qu’une dizaine de minutes pour se procurer un faux arrêt de travail. Sur des plateformes semi-clandestines, parfois hébergées hors du territoire national, l’utilisateur choisit une affection bénigne, précise la durée souhaitée de l’arrêt et règle une somme modique – autour de 9 à 15 euros selon les options. En retour, un fichier numérique lui est transmis, contenant un certificat en apparence parfaitement valide.

Ces faux documents imitent les originaux avec minutie :

  • usurpation du nom, du cachet et du numéro RPPS de praticiens réels,
  • mention d’une pathologie peu suspecte (grippe, lombalgie, gastro-entérite),
  • présentation soignée et cohérente avec les formulaires habituels.

La démarche, simple et rapide, échappe dans la majorité des cas à tout contrôle de l’employeur ou des services administratifs.


Un médecin généraliste témoigne :

Visuellement, c’est indiscernable d’un vrai. Seul un examen croisé, avec appel au cabinet mentionné ou recoupement avec l’agenda du praticien, pourrait alerter. Mais qui a le temps de faire ça ?

Une vigilance insuffisante face à une fraude difficilement traçable

La Caisse nationale de l’Assurance maladie admet une augmentation des signalements liés à ces arrêts falsifiés. Le procédé repose souvent sur le détournement d’informations librement accessibles sur des bases comme l’annuaire santé d’Ameli.

L’Ordre des médecins a recensé au moins vingt cas d’identités médicales usurpées au premier trimestre 2024. La recrudescence est significative depuis 2022, sans réponse structurelle à ce jour.

AnnéeSignalements reçusMédecins concernésEstimation du préjudiceNature des cas
2022863,4 millions €Faux simples
202317137,9 millions €Usurpations identifiées
2024*20+18+En cours d’analyseMédecins alertés directement

(*chiffres au 1er trimestre)

Les mécanismes de détection sont encore trop peu développés. Le croisement automatique des données, la vérification des IP d’émission ou le signalement en temps réel des anomalies demeurent à l’état de projet. Pourtant, le coût financier est bien réel. Les indemnités journalières versées à tort, les jours d’absence non productifs et les contentieux administratifs fragilisent davantage un système déjà sous tension.

Une infraction pénale encore peu réprimée

Produire ou utiliser un faux arrêt de travail constitue un délit pénal. L’article 441-1 du Code pénal prévoit jusqu’à cinq ans d’emprisonnement et 75 000 euros d’amende. En pratique, les poursuites restent rares. La difficulté tient dans l’identification des auteurs : l’utilisateur final est rarement inquiété, tandis que le médecin victime découvre souvent l’usurpation tardivement, lors d’un appel d’un tiers ou d’une demande de justification administrative.

Face à ces dérives, plusieurs pistes sont évoquées par les professionnels de santé :

  • authentification numérique renforcée des certificats,
  • notification automatique des arrêts émis au médecin concerné,
  • accès restreint et sécurisé aux bases d’identité professionnelle.

Mais ces solutions restent embryonnaires. En attendant, des milliers d’arrêts frauduleux sont indemnisés chaque année, alimentant une économie souterraine discrète et coûteuse.

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