Tomber malade pendant ses congés payés n’a jamais été synonyme de bon timing, mais la situation pourrait évoluer pour les salariés français. La Commission européenne a récemment adressé une mise en demeure à la France, dénonçant un manquement aux règles européennes sur le droit au repos. En l’état, un salarié malade pendant ses vacances en perd les jours, sauf si l’arrêt maladie débute avant la période prévue. Une différence notable avec le droit communautaire, qui considère que maladie et congés ne peuvent juridiquement se superposer. Bruxelles donne deux mois à Paris pour rectifier le tir. Nous faisons un point complet sur une possible modification des arrêts maladie lors de congés.
Ce que vous allez découvrir :
Un encadrement national en décalage avec le droit européen
En France, le code du travail ne prévoit aucune disposition permettant de récupérer des jours de congés si une maladie survient pendant les vacances.
La Cour de cassation confirme cette interprétation : c’est la première absence enregistrée qui fait foi.
Ainsi, lorsqu’un salarié tombe malade alors qu’il est officiellement en congé, il n’a aucun droit à un report.
Seule échappatoire : que l’arrêt soit prescrit avant le début des congés. Dans ce cas, les jours peuvent être conservés et reportés, puisque l’absence pour maladie précède celle pour congé.
Ce fonctionnement s’oppose frontalement aux exigences de la directive 2003/88/CE. Le droit européen fait clairement la distinction entre le congé payé, considéré comme un temps de repos destiné à la récupération, et l’arrêt maladie qui est destiné à se soigner.
L’un ne saurait remplacer l’autre.
Une nouvelle réforme avec 2 jours de congés supplémentaires pourrait arriver lors de catastrophe naturelle.
Bruxelles somme la France de se mettre en conformité
Dans sa lettre du 18 juin 2025, la Commission européenne rappelle que les États membres doivent garantir à chaque salarié au moins quatre semaines de congés payés effectifs par an, ce qui suppose que ces jours puissent être réellement pris en dehors de toute période d’incapacité.
La France dispose de deux mois pour répondre à cette mise en demeure. En cas de réponse jugée insatisfaisante, la Commission pourra saisir la Cour de justice de l’Union européenne. Une condamnation pourrait déboucher sur une réforme imposée, d’ici fin 2026.
Une avocate en droit social résume ainsi l’impasse actuelle : « Un salarié malade ne peut pas être considéré en congé ». La jurisprudence européenne pourrait, à terme, primer sur les règles nationales.
Une dynamique sociale qui fragilise davantage les salariés
Cette mise en demeure intervient dans un contexte où l’absentéisme progresse fortement.
Le Datascope 2025 d’AXA révèle une hausse de 41 % depuis 2019, reflet d’une pression accrue dans le monde du travail et d’une dégradation des conditions de santé mentale et physique.
Voici les chiffres du taux d’absentéisme ces dernières années :
Année | Taux d’absentéisme | Évolution annuelle | Principales causes |
---|---|---|---|
2019 | 4,9 % | — | TMS, stress |
2021 | 6,1 % | +24 % | Covid-19, charge mentale |
2023 | 6,7 % | +10 % | Burn-out, fatigue chronique |
2025 | 6,9 % | +3 % | Troubles anxieux, dépressions |
Dans le même temps, l’Assurance Maladie demande aux professionnels de santé de restreindre les arrêts de courte durée.
Dans un contexte de précarisation croissante, l’arrêt maladie devient parfois un dernier rempart pour nombre de salariés épuisés.
Un possible alignement sur les standards européens
Si la France modifie sa législation, elle rejoindra plusieurs États membres ayant déjà intégré cette protection dans leur droit interne.
Le report des congés en cas de maladie est notamment prévu en :
- Allemagne : sous réserve d’un certificat médical
- Espagne : dès le premier jour d’incapacité, même si la maladie survient pendant les congés
- Belgique : avec notification immédiate à l’employeur
Cette évolution permettrait d’intégrer à la législation française la possibilité de différer les congés payés en cas de maladie, au même titre que les congés exceptionnels déjà reconnus (catastrophes naturelles, décès, etc.).